L'Auvergne, l'échappée belle de Sébastien
Le 18/12/2013
À l'occasion de la sortie en salle du film Belle et Sébastien, Mehdi El Glaoui, héros du feuilleton des années soixante, fait paraître La belle histoire de Sébastien où il raconte son amour du Cantal.
Grandir est cruel. Rencontrer les héros de l'enfance aussi. Car la vérité est rude : Sébastien n'a plus les yeux ambres et Belle, la chienne montagne des Pyrénées du feuilleton télé, cachait sous sa toison poilue de virils attributs. Claps de fin et fin des illusions.
Aujourd'hui, « Sébastien », le petit sauvageon qui courait la montagne est devenu un homme serein de 57 ans, un acteur et réalisateur mâture et discret, un époux amoureux de la comédienne Virginie Stevenoot et un jeune papa comblé.
Acteur, auteur, scénariste, réalisateur, Mehdi El Glaoui a accepté de jouer un rôle dans Belle et Sébastien, le remake réalisé par Nicolas Vanier (1). À cette occasion, l'acteur se livre dans son autobiographie, La belle histoire de Sébastien (2) où il raconte son attachement au Cantal, une terre d'exil qui l'a sauvé du pire.
Flash-Back. 1962, Mehdi a six ans. En compagnie d'un énorme chien blanc, le gamin craquant crève l'écran dans les décors naturels des montagnes alpines.
Tout comme l'animal, l'enfant est farouche, spontané et confondant de naturel devant la caméra. Sa mère, Cécile Aubry, auteur et réalisatrice, veille sur ce fils prodige qui lui inspire tant de merveilleuses histoires.
Il y eut Poly, le poney à la crinière blonde, Belle et Sébastien et ses déclinaisons (Sébastien parmi les hommes, Sébastien et la Marie-Morgane) puis Le jeune Fabre qui fit découvrir une débutante du nom de Véronique Jannot.
Ça tourne. Les scènes s'enchaînent, les films aussi. Mehdi est beau gosse et reçoit des lettres d'admiratrices par milliers. Il a le regard fier d'un fils de désert et son itinéraire n'est pas banal.
Sa mère lui offre un chemin tout tracé vers le succès, son père est un véritable pacha marocain qui brille par son absence. Le gamin grandit et commence à se sentir à l'étroit dans le costume de comédien que lui taille sur mesure sa maman. L'adolescent se cherche, se rebelle. Pas facile de se construire dans le tumulte des années 70.
À 17 ans, Mehdi est un mineur émancipé. Il décide de fuir, loin des sunlights. Le hasard fait que c'est en Auvergne qu'il trouve refuge pour faire le point sur son parcours. « À l'époque, je profitais à fond de la vie parisienne, des nuits folles et des rencontres faciles. Un soir, je croise Jean-Claude Leguay, un chanteur qui veut créer, au coeur de l'Auvergne, un festival qui réunirait artistes et créateurs », raconte Mehdi. Le copain lui propose de faire partie de l'aventure comme assistant. Banco !
On/Off. « Le Cantal m'est toujours apparu comme un Eldorado sauvage, riche en promesses d'aventures, une terre qui se livre peu à peu comme les gens qu'elle abrite ». L'adolescent débarque en plein été dans la cité médiévale de Salers. Il y a les parfums des fleurs des estives, les puys majestueux, la beauté des vieilles pierres. « Et puis il y a l'hiver, et là j'ai compris ce que ça voulait dire : vivre en Auvergne ! », lance-t-il en riant. Malgré le froid, Mehdi tient bon. Il ne veut plus entendre parler de Sébastien, ne veut plus être comédien.
À Salers, le rôle d'assistant lui convient tout à fait. « Cette échappée m'a sauvé d'une vie parisienne dans laquelle j'aurais pu me perdre. L'Auvergne m'a remis les pieds sur terre. J'ai redécouvert le b.a.-ba des métiers du cinéma et j'ai fait en Auvergne des rencontres humaines formidables. Dites-le, j'ai vécu dans le Cantal durant dix-sept ans, ça a été les plus belles années de ma vie ».
C'est que Mehdi ne fait pas les choses à demi. Amoureux « des vieilles granges, des burons, des toits de lauze », il achète une fermette délabrée, projette d'y ouvrir une gargote, puis renonce. Se lance alors dans l'aventure de la bande FM en donnant la parole à cinq papys dont les propos en patois sont ponctués d'éclats de rire qui se diffusent sur les ondes libres. Mehdi retape sa bicoque et bâtit des amitiés indéfectibles.
Encore aujourd'hui, l'acteur essaie de consacrer du temps à ce Massif central qu'il aime tant. « Avec mon ami Jacques Davi, ancien gérant du musée de Mauriac, on est addicts aux girolles et aux cèpes ! », avoue-t-il sans forfanterie.
Bonus. Finalement, le grand Mehdi n'est pas si éloigné du rôle qui a marqué sa vie. Il aime la vie simple, les animaux « mais j'ai un chat parce qu'un chien avec nos vies c'est compliqué » les meubles d'antiquaires et les vieilles motos. Les belles choses façonnées par des artisans, les outils qui se repassent de générations en générations, les savoir-faire et les relations humaines authentiques et parfois rugueuses.
Comme une gentiane partagée au zinc d'un bistrot cantalou.
(1) Belle et Sébastien, de Nicolas Vanier, d'après l'oeuvre originale de Cécile Aubry, sortie nationale aujourd'hui.
(2) La belle histoire de Sébastien de Mehdi El Glaoui, éditions Michel Lafon, 237 pages, 17,95 ?.
Véronique Lopez
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